Au bar de la lune
C’était au bar de la lune
Que nous cherchions fortune,
Oubliant notre peine
A dix neuf ans à peine
Certains soirs de tristesse
Par une nuit d’ivresse.
Là, où des filles de petites vertus
Accordaient à des soldats perdus
Des instants de tendresse
En échange de quelques pièces.
Alors qu’un juke-box au son incertain
Crachait des tubes américains,
Sous un ventilateur grinçant
Nous parlions tout en rêvant
De filles, d’amour,
Du jour de notre retour.
Noyant notre ennui
A fortes doses de whisky.
C’est sous cette chaleur oppressante
Dans une atmosphère envoûtante
De mille senteurs épicées
Que je l’ai rencontrée,
Petite fleur du désert
Aux yeux couleur misère.
Oubliant un instant sa détresse
Tout en pardonnant mon ivresse
De cette nuit sans sommeil
Elle en fit une merveille
M’accordant pour souvenir
Un magnifique sourire.
La petite histoire
Mars 1977, je suis sur le TFAI depuis quelques jours et nous décidons à plusieurs, d’effectuer notre première sortie en ville. Après avoir fait quelques bars dans la ville haute, nous nous dirigeons vers le bar de la lune, situé dans une rue adjacente au centre-ville. À peine installés, des filles nous rejoignent, l’une d’entre elles s’installe sur mes genoux, c’est la seule habillée à l’européenne, elle a sans doute dans les 17 ans, moi à peine 19. Je suis dans un autre monde, bien loin de ma Comté natale. Elle me dit être éthiopienne et se nommer Soleil, traduction française de son prénom . En leurs compagnies nous noyons notre angoisse dans l’alcool. La corne africaine est une vraie poudrière et l’indépendance est pour peu. Puis en fin de soirée, elle me prend la main, je la suis, l’esprit embrumé. Nous traversons la place Ménélik, puis Lagarde,et pénétrons dans une vieille bâtisse coloniale, un grand escalier de bois, en haut, une chambre immense, avec de hautes fenêtres, un plafond inaccessible un vieux parquet grinçant et juste un lit. Moyennant, quelques billets, elle m’accorde ses faveurs. Malgré son jeune âge, elle a plus d’expériences que moi. Je me réveille quelques heures plus tard, elle est assise à mes côtés, se moquant gentiment de ma naïveté perdue .
Copyright © 2001 [carnet à spirales] Dany – Tous droits réservés
Tous les hommes de mon Age sont passés un jour ou l’autre par ces femmes qui déniaisent et parfois même offrent du bonheur ou un bout de rêve.
Pour les adolescents les filles de joie
Valent mieux que des filles de bois,
Qui ne vont qu’avec des soldats
Tous ceux qu’elles ne reverrons pas.
Et aussi ceux qui aiment bien croire
A l’ivresse que procure le goulot
A défaut d’avoir du culot.
Filles de joie, le plus vieux métier du monde, source de fantasmes, quelles qu’elles soient , elles ont droit au respect, merci Mustapha pour vos mots.
J’ai bien connu le bar la Lune et Linda sa charmante patronne dans les années 90 et 2000.
Djibouti m’a aussi beaucoup inspiré.
Un petit poème autobiographique écrit la bas, qui résume assez bien mes années djiboutiennes.
Afrique, corne d’Afrique,
Afrique, corne d’amour,
Sont-ce tes filles à la peau sombre
Ou tes déserts de pain brûlé,
Qui m’ont donné tant de bonheur,
Qui m’ont conquis à tout jamais?
Afrique, corne d’Afrique,
Afrique, corne d’amour,
Petits matins à l’aurore rapide
Ou le chant du muezzin
Venait me réveiller,
Serré contre ton corps
Dans la tiédeur humide
D’un toukoul d’amour,
Hoooo, rêves magnifiés.
Afrique, corne d’Afrique,
Afrique, corne d’amour,
Sous ton plafond d’étoiles
Que de nuits j’ai passées,
La ligne dans la main,
Frémissante de vie,
Allongé sur le boutre
Aux couleurs surranèes,
Me disant simplement,
J’ai trouvé le répit.
Djibouti, nul n’en ressort indemne, nul n’oublie cette terre d’un autre monde. Comme toi, Djibouti est à jamais gravé dans mes souvenirs. Merci pour ce texte magnifique, qui me parle beaucoup !
Tant de tendresse et de chaleur, vos mots sont magnifiques.
Du vécu Nanie, merci beaucoup.
Toujours cette même émotion devant ce texte où se côtoient le triste le sublime,la générosité…
La vie avec sa mocheté et ses belles surprises…
Magnifique! Tout ce qui fait l’art poétique est là: la simplicité, la musicalité, la profondeur mêlée au souci du détail et le suspens maintenu par la longue description préparant une narration assez brève, qui se limite à raconter juste la rencontre suivie d’une « nuit sans sommeil » et ce qui la couronne: le don! Un beau récit poétique qui se termine sur une note très positive: le sourire! La trivialité du vocabulaire sied bien au lieu et à l’ambiance de la rencontre. J’aime beaucoup!
Je ne me souviens que « du Palmier en zinc » ! Mais cela fait plus d’un demi siècle ! Alors pardonnez moi, si j’ai des trous de mémoires !
Tes poèmes sont superbes Dany. J’aime beaucoup !
Merci dany pour ce beau texte
Bravo …… magnifique ….joliment écrit…
Touchant de réalisme…!